V I S I O N
Il y a des choses qui me ramènent à ma mémoire. Qui éveillent le souvenir. Ca va chercher loin. Dans un temps que je n’ai pas vécu. En tout cas, pas cette fois-ci. C’était quelqu’un d’autre. Un autre moi. Une autre enveloppe. Ailleurs. Avant.
L’odeur du beurre de karité.
Le souvenir sensoriel qui me fait dire que j’y étais. J’ai déjà fait ça. C’était une odeur rituelle. Le geste quotidien. Il se pourrait même que je l’ai fabriqué moi-même. Ça vient caresser mon âme. Je goûte aux mémoires d’incarnations passées. C’est sûr. Et à l’échelle de mon âme, ça doit dater d’hier.
Et là, tout de suite, maintenant, il n’y a pas de temps. Distorsion du cerveau qui cherche à raccrocher les informations. Mais des informations, je n’en ai pas. Alors, à force de distordre, le cerveau disparaît, essoré sur lui-même. Et je suis là dans l’espace de ce souvenir, sans temps.
Et alors, tout devient possible.
Je suis au Sénégal. Il y a les baobabs. J’ai des tonnes d’images. J’en ai une où il y a un énorme baobab, la poussière de sable au pied et les enfants qui jouent aux cailloux. Ailleurs, c’est une femme. Elle pile le millet. Au-dessus d’un très gros mortier, elle arme un grand pilon. Et avec la force accumulée dans son ascension, la prise d’élan, elle le projette au fond du récipient. Les grains non touchés se soulèvent par onde de choc. Les muscles dorsaux de la femme aux cheveux courts, tressés, se préparent pour le nouvel assaut. Et ça s’enchaîne. Elle n’arrêtera pas son geste qui ancre avant que tout ne soit réduit en poussière. Tout ça, c’est pour manger. Voilà comment là-bas on prépare la farine.
LAEG, le 23/01/2023
Violès – images intuitives au sortir de la douche, en utilisant le beurre de
karité
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