Vivre là

 


J'aimerais tant pouvoir vous décrire non pas le paysage, mais ce que je ressens. 

 

Et en même temps, je ne suis pas capable de trouver les bons mots tellement ils ne suffiraient pas. C'est au plus profond de moi que cela vient me cueillir. 

 

Des émotions fortes, un peu de l'ordre de l'expansion, de l'ordre du moment en grâce, mais tout doux. 

 

C'est pour cela que je voudrais vous le dire, vous le partager. Mais résolument, je n'ai pas les mots. Je n'ai même pas la capacité mentale de faire des jolies phrases, mon cerveau est éteint. Je suis bouche bée. Scotchée sur place. Suspendue.

 

Mes yeux regardent et sillonnent le paysage. Ils se faufilent entre les arbres, leurs couleurs. Ils observent la vague que décrivent les geais des chênes dans un vol approximatif et pourtant si bien maîtrisé. Par moment la pluie imite le bruit de la rivière en tombant sur les feuilles d'automne. Si bien que je confonds, je ne sais pas qui est qui,  la rivière, les arbres ou la pluie. Tout se mélange en harmonie. 

 

Et cette grandiosité, parce que oui, cette montagne là est grandiose, transperce. Elle en impose. De par sa taille, par sa beauté. Sous son chapeau de neige et encore les feuilles d'automne accrochées aux arbres. Tout au loin, on aperçoit la cascade et le zigzag enneigé qui monte à la grotte. Une percée de ciel bleu. Un rayon de soleil et des nuages comme des Barbapapa qui remontent vers le ciel, et s'effilochent.

 

Peut-être que le seul moyen de pouvoir partager ce paysage serait que vous soyez là, et de toute évidence, nous ne verrions même pas la même chose. Oui, il faudrait que vous voyez ça. Et alors, on partagerait nos résonnances. Ce paysage là, que je vois devant moi, résonne avec mon paysage intérieur. C’est cela qui est difficile à expliquer. Un paysage lui aussi dans toutes ses ambivalences.  

 

Une envie de crier la beauté et pourtant ne pas avoir les mots. 

 

Une envie de danser ma joie et un immobilisme qui s’impose, plantée là.

 

Les yeux qui fixent et balayent en même temps. 

 

Une envie de partir à cause du froid et le profond sentiment d’être au bon endroit.

 

À ce moment précis, quel bonheur d’arrêter de me désirer ailleurs. 

 

Treminis, face au Grand Ferrand, le 1er novembre 2023

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